En faisant quelques recherches à la B.U. de Paris VIII, j'ai trouvé les audiences télé du 1er semestre 1989, plutôt intéressantes avec le recul... Avant de vous les soumettre, résumons les forces en présence :

- TF1 : privatisée depuis deux ans, 43.7% de PdM.
- A2, chaîne publique, 23%.
- FR3, chaîne publique, 8.9%.
- Canal+, chaîne cryptée en plein essor, 4%.
- La Cinq, créee il y a trois ans, 12.5%.
- M6, créee il y a deux ans, 6.3%.

Voici donc les parts de marché de janvier-juillet 1989, en semaine et par tranche horaire. Je donne dans l'ordre : TF1, A2, FR3, C+, LA *5, M6.

7h-9h : 27.0, 50.6, 0, 1.9, 12.7, 6.2.
9h-12h : 41.0, 20.7, 3.0, 5.4, 16.2, 10.5.
12h-13h30 : 55.0, 26.2, 3.2, 2.9, 4.5, 7.4.
13h30-18h : 37.3, 22.4, 5.7, 4.1, 20.0, 8.3.
18h-20h : 54.6, 15.9, 13.1, 4.8, 6.7, 3.8.
20h-22h30 : 40.9, 20.1, 13.4, 4.2, 14.0, 6.1.
22h30-0h : 39.5, 19.3, 6.7, 5.9, 23.1, 4.0.

Quelques remarques.

TF1 : la chaîne en béton écrase tout sur son passage. Sauf en début de matinée (qui se rappelle du flop retentissant de "Bonjour la France" en face de "Télématin" en 1987-88 ?). Audiences énormes le midi (grâce au trio de choc "Tournez Manège"-"Le Juste Prix"-"Les traditions de nos régions") et en avant-soirée, grâce au tandem infernal "Santa Barbara"-"La roue de la fortune".

A2 : c'est la cata ! La chaîne est en train de couler : le déficit est abyssal, elle a perdu un tiers de son audience en deux ans et ses animateurs-vedette (Foucault, Gillot-Pétré, Dechavanne, Dorothée et sa bande) sont partis à la concurrence... Seul "Télématin" tient bon le cap. La tranche 18h-20h est particulièrement désastreuse : "Des chiffres et des lettres" et les actualités régionales ne passionnent plus les foules...

FR3 : c'est la déconfiture : en quinze ans, la chaîne avait péniblement réussi à se faire une place entre ses deux grandes sœurs; et v'là que la chaîne en béton et la chaîne spaghetti (j'ai nommé La-Une-même-qu'y-en-n'a-qu'une et Cinq-you-la-Cinq) lui piquent la moitié de son audience à grands coups de séries américaines. En ce début de 1989, avec sa grille réduite (les programmes s'arrêtent encore à minuit !) et pour le moins hétéroclite ("La Classe" et "Benny Hill" contre "Questions pour un champion" et les documentaires de la Sept, le choc des cultures !), la Trois laisse une impression de confusion. Mais elle s'en remettra !

C+ : la chaîne cryptée poursuit sur sa lancée, plus insolente que jamais. Chaque soir, un petit million de téléspectateurs se tient au courant des nouvelles tendances musicales grâce au "Top 50", rigole aux pitreries des Nuls et assiste aux débuts des Guignols dans "Nulle part ailleurs"...

LA *5 : il faut avouer qu'avec un programme peu ragoûtant (K2000, La clinique de la Forêt-Noire, Supercopter, Soko-brigade-des-stups, Tonnerre Mécanique, Inspecteur Derrick, Happy Days, Voisin Voisine, le journal de Jean-Claude Bourret...), la Cinq su trouver son public. Particulièrement aux heures creuses (9h-midi et 13h30-18h), où le cocktail vieux stocks de l'ORTF+séries américaines semble séduire la ménagère de moins de 50 ans... Pire encore : la Cinq se paie le luxe de dépasser Antenne 2 en deuxième partie de soirée !

M6 : tout doucement, la Six se taille une petite place entre les géants de la télévision française. Mais elle n'est reçue que sur deux tiers du pays, son déficit est important et pour la ministre de la Communication Catherine Tasca, "il y a une chaîne en trop dans le PAF". La Six, obligée de se faire discrète et de jouer serré, ne deviendra vraiment "la petite chaîne qui monte" qu'en 1992, à la mort de la Cinq. Pourtant, elle lance ses propres magazines : "Capital", "Culture pub", et innove avec le "6 minutes".

Merci énormément Cosmogol 999

Si tu trouve d'autres documents de ce genre ce serait super que tu les mettent en ligne

Très intéressant. Merci

merci

Merci Cosmogol 999,
Ca fait plaisir de lire des posts bien écris, bien présentés et qui ont du fond.

Super intéressant ton message Cosmogol

MERCI

Merci pour ton message.

très bien écris...et très interréssant

On va peut-être dire qu'au vu de mon pseudo je ne suis pas totalement objectif concernant ce vieux sujet, mais le résumé qui est fait de l'analyse de l'audience de La Cinq est digne d'un journaliste de Télérama et plutôt réducteur quant aux programmes diffusés par la chaîne... Pas parfaite certes mais faut se calmer !!

Soyons sérieux. Aucune des six chaînes que j'ai analysées ne pouvait prétendre à la perfection, de toute manière. La Cinq a toujours eu une programmation bas de gamme, ça faisait partie de son impératif commercial : un bassin d'audience réduit, la concurrence des chaînes établies, l'impossibilité de trop investir dans les programmes (qu'on se souvienne du débauchage ruineux des stars de la Une à l'automne 87...)

D'où donc ce "cocktail vieux stocks de l'ORTF+séries américaines" qui résume parfaitement le gros de la grille de la Cinq et qui a bel et bien fait son succès auprès d'un public plutôt jeune, masculin, urbain et d'instruction moindre (c'est pas moi qui le dis, hein : les chiffres de Médiamétrie prennent en compte ces quatre critères...)

D'ailleurs, s'il y avait un seul ajout à faire à mon premier message, je dirais que c'est précisément l'impossibilité de conquérir la fameuse "ménagère de moins de 50 ans" (expression assez ignoble, mais importante dans la télévision commerciale...) qui a signé le glas de la Cinq. Les apologistes de celle-ci auront beau me dire "oui, mais la Cinq a vachement investi sur l'info", je dirai d'une part :

- oui, mais ça leur a coûté cher et ça n'a pas été payant en terme d'audience. Des chiffres ? En décembre 1988, l'audience des JT de 13 heures et 20 heures se répartissait ainsi, en points d'audience :

13 heures :
TF1 18,6
A2 13,4
LA5 2,8

20 heures :
TF1 28,8
A2 15,2
LA5 4

Le téléspectateur était loin d'être au rendez-vous... par comparaison, le "Six minutes" de M6 a tout de suite eu un succès significatif, parce que c'était un JT différent dans son ton et dans son format.

- D'autre part, l'information sur la Cinq a aussi eu tendance à jouer sur le sensationnel. Qu'on se rappelle de l'affaire Pauline Laffont, ou du reportage sur le Prince noir du périphérique" qui a valu un blâme du CSA, ou des débats qui opposaient toujours des extrémistes (Laguiller contre un ponte du F.N., par exemple...) et menaçaient toujours de virer au pugilat...

Voilà. Tout ça pour dire que si quelqu'un doit garder la tête froide, c'est bien toi, David5.

Je savait déjà que FR3 avait eu un gros passage a vide dans les années 80 mais je me demande toujours grace a quoi et à qui elle a remonté.

Pour les JT, les chriffres de 13h des deux grandes chaines paraissent bien faibles, n'y a t'il pas une erreur ?

Voici un petit graphique :

TSSSSSS, j'avais posté ici un article de Ouest France qui rendait hommage à la rédaction de la 5 en 89 pour sa couverture de la révolution roumaine et qui a couté la vie à Calderon.
Quand à l'auditoire à l'instruction moindre, ça me fait hérisser mais bon. Un petit exemple personnel, mais ma tante avait enregistré les 10 commandements de Cecil B de Mille en 89 sur la 5. Au fait, elle était éducatrice pour enfants trisomique....

Pour les séries, ouais, c'est sur que je ne pourrais plus etre scotché devant "sherif fais moi peur " mais bon à l'époque, c'était tendance ! Peut etre que dans 20 ans, on trouvera que 24 heures chrono était vraiment de la merde qui sait....

Par contre, tu est caricaturale quand tu parles des débats qui réunissait des extrémistes . Tu te bases sur qualques extraits spectaculaires que tu as vu. J'ai eu l'occasion d'en revoir plein sur inamedia et je peux te dire que 75 % des débats étaient soporifiques...
Pour Pauline Laffont, Guillaume Durand en recevant son 7 d'or avait publiquement présenté ses excuses à Bernadette Laffont Qui d'autre d'une autre chaine a déja présenté des excuses franches ? Il y aurait de quoi dire concernant TF1 et F2...

Et puis bon, si l'info était de la merde, comment expliquer que Béatrice Schonberg, Gilles Schneider, Florence Dauchez, Thierry Guerrier, Gregoire Deniau, Gilles Bornstein, Roselyne Febvre sont passé par la 5 et sont aujourd'hui reconnu comme n'étant pas des journalistes qui font les caniveaux ?

Par contre, je prend connaissance des chiffres du 12H30-14H de la 5 et c'est clair que M6 la bat à plate couture

ce que je retiens de ces chiffres : c'est la dégringolade de Tf 1 .... elle a perdu près de 14 points d'audience contre 4 à france 2 ....

Encore une fois, c'est bien Médiamétrie qui prend en compte ce genre de catégories. Je ne fais pas de la ségrégation de classes par pur plaisir. CSP+, c'est bien synonyme de "instruction supérieure, revenus élevés" ? Eh bien, il est clair que les CSP+, par exemple, n'étaient pas le public principal de la Cinq. Quant à la diffusion des "Dix commandements", tu penses bien que la Cinq ne l'a pas fait pour ses éventuelles qualités pédagogiques, mais bien uniquement pour l'audience conséquence que pouvait amener le film. À la limite, même TF1 pourrait le rediffuser.



Si 75% des débats étaient soporifiques et les 25% restants racoleurs, c'est bien qu'il y avait un problème...

Par ailleurs, je n'ai jamais dit que "l'info était de la merde", seulement qu'il y a eu sur la Cinq un certain nombre de débordements qui ont beaucoup contribué à décrédibiliser l'info télé, à une époque où la course à l'audience commençait à peser lourdement sur le contenu des JT. Quant aux journalistes que tu cites, je ne pense pas qu'ils étaient les responsables de ces débordements, mais ils faisaient partie d'un système médiatique qui les a engendrés. On peut être ouvrier dans une usine d'obus et être parfaitement honnête par ailleurs.



Encore faudrait-il qu'on sache de quelle période tu parles. Moi, je vois que depuis 1992 TF1 a perdu 9 points et France 2 5... tu ne dois pas lire les bons chiffres.